Les férus de concerts n’en pouvaient plus de ce satané confinement, suivi de près par une réglementation aussi stricte que vague concernant la réouverture des salles de spectacles. Mais malgré la crise sanitaire et ses effets de précarisation sur le secteur culturel, quelques lueurs d’espoir brillent dans la nuit de ce grand n’importe quoi qu’est l’année 2020. Avec la mort (temporaire) de la scène, plus grande la scène ? C’est ce que semble nous démontrer en partie la programmation 2020 de Jazz Magazine, entre grand retour sur les planches d’un des plus récents Jazz Club à Paris, le Bal Blomet, et nouvelles trajectoires héritées de la période de confinement. Une réflexion fondée sur les propos recueillis auprès d’Edouard Rencker, directeur de la publication de Jazz Magazine, que nous remercions.
Jazz Magazine à l’heure du digital : l’opportunité d’un nouveau souffle
Avec le confinement, plus de concert en salle et de fait la nécessité d’un tiers-lieux dédié non pas à la musique, mais à la représentation live du 4e art. Nous l’avons tous constaté (et, espérons-le, expérimenté), les réseaux sociaux se sont magistralement improvisés salles de spectacles. Une expérience du live depuis son canapé qui, bien loin de la chaleur artistique d’un Jazz Club à Paris, aura eu le mérite de maintenir notre connexion avec les artistes comme d’en créer une nouvelle, le format web nous donnant un accès quasi-illimité à tous types de cultures et d’informations.
Pour Jazz Magazine, le constat est sans appel : chaque semaine, nous étions des milliers à visionner les concerts live orchestrés par les artistes amis de la maison. Des milliers d’amateurs de musique jazz et blues avérés, mais pas que ! Plus qu’un maintien de sa communauté, Jazz Magazine a su toucher par le biais du numérique de nouvelles oreilles et nouvelles sensibilités. A ce sujet, Edouard Rencker confiera même que s’il n’a “plus tous les chiffres en tête, Jazz Magazine a gagné environ mille followers sur Facebook pendant le confinement” et fédéré “des milliers de personnes ayant regardé les concerts en live” sur la page.
L’opportunité saisie pour le magazine d’étendre son public, certes, mais surtout de faire découvrir un style musical hélas encore trop réputé “difficile d’accès” comme le souligne Edouard Rencker. Ne nous étalons pas ici en un vain cours d’histoire de la musique, à cela près : le jazz est constitutif de nombreuses autres mouvances musicales, à commencer par le hip hop, le rap ou encore le r’n’b (qui signifie rythm and blues, ne l’oublions pas). Des musiques urbaines qui sont aujourd’hui les plus streamées dans le monde entier, ce majoritairement par les plus jeunes générations. De quoi créer un pont reliant les habitudes d’écoutes du grand public à ses origines jazz et blues.
Durant le confinement, le magazine a part ailleurs lancé sa formule DigiJazz, proposant trois mois d’abonnement numérique ainsi qu’une année entière d’accès aux archives du magazine, ce gratuitement. Une stratégie digitale axée sur les réseaux sociaux qui de fait joue avec les nouveaux codes de consommation des biens culturels, certes, mais sans omettre l’essence même du magazine papier : une expertise et une passion pour un style musical centenaire.
Une programmation 2020 très grand public, dans un Jazz Club à Paris des plus fréquentés
Toujours pas de hip hop ni de rap cette année pour les Jeudis de Jazz Magazine, mais une programmation qui s’attaque aux grandes pontes de la musique blues et jazz. Un retour aux sources sous forme d’hommages, de (re)découvertes d’artistes ayant jalonné le genre.
La programmation pour septembre / octobre :
Dès le jeudi 24 septembre, place à l’un des meilleurs pianistes de sa génération, Laurent de Wilde, pour un concert-anniversaire dédié aux grands classiques des Jazz Club parisiens et new-yorkais. Les amateurs de Thelonious Monk (ne le sommes nous pas tous, au fond de nous ?) ne seront que trop les bienvenus.
Vague de sonorités sauvages pour le concert du jeudi 8 octobre avec Arnaud Fradin & His Roots Combo ! Du blues, du blues et encore du blues, un brin de nostalgie emprunté aux récits de William Faulkner pour relever le tout. Combo Roots, c’est le rendez-vous immanquable des amoureux des grattes sèches, harmonicas essoufflés et voix rocailleuses.
Pour les férus de saxophone, optez davantage pour le live hommage à Charlie Parker du mercredi 14 octobre, orchestré par le talentueux Pierrick Pédron. Un concert digne des plus grands Jazz Club à Paris où, le temps d’une soirée, nous oserions croire que le Bird serait encore parmi nous.
Les aficionados de musique jazz n’auront guère besoin de présentations : Anne Ducros, c’est neuf albums studio et tout autant de récompenses au fil de sa carrière. La vocaliste française reprendra sur les planches du Bal Blomet le 22 octobre de grands classiques du XXe siècle, tous styles confondus. Ainsi les Beatles côtoient Django Reinhardt et Elton John pour une soirée qui s’annonce aussi culte que jazz. Immanquable !
C’est toujours dans cet esprit de “concert en famille” que reprennent donc les Jeudis de Jazz Magazine au Bal Blomet. Et cela se sent : des musiciens investis sur scène dans le goût des soirées entre amis où l’on s’échange nos trouvailles musicales entre deux ou trois verres de bon vin. Cette année, ce sera le masque sur le nez et la jauge d’entrée du Bal Blomet limitée que pourra se faire la réouverture de ce Jazz Club à Paris; pour les plus patients, attendez-vous à une nouvelle édition du Jazz Magazine Festival plus enflammée que jamais. De quoi apprécier davantage l’incroyable programmation de rentrée du magazine en faisant de nous spectateurs des personnes plus privilégiées que jamais.
En raison de la situation sanitaire, le port du masque est bien évidemment obligatoire durant tous vos déplacements. La jauge étant limitée, l’entrée ne se fait que sur réservation préalable.
Le mot de la fin, la playlist de rentrée 2020
Edouard Rencker, directeur de la publication pour la Jazz Magazine, nous a confié ses petites pépites et autres lubies auditives écoutées cet été. En tête, l’album coup de coeur de Thomas Dutronc Frenchy, notamment composé d’un trio aussi improbable que détente avec Diana Krall et Iggy Pop, C’est si bon, ainsi qu’une reprise de La belle vie en duo avec… Jeff Goldblum. A écouter sans modération, accompagné d’une note de purisme en la personne de Bill Evans, précisément son live au Village Vanguard de 1961.
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