Fuji, pays de neige est une exposition qui, au regard de sa qualité, a fort peu fait parler d’elle. Est-ce dû à la période de trouble sanitaire ? A la relative confidentialité du Musée des arts asiatiques Guimet ? Au désintéressement culturel de tout un chacun ? Si ce papier ne répondra pas à toutes ces interrogations, il vous donnera cependant envie de découvrir les fabuleuses estampes de l’exposition Fuji, un voyage poétique et onirique… mais aussi de (re)découvrir les saisissantes collections permanentes du musée Guimet.
L’exposition Fuji, située exceptionnellement au sous-sol du musée, nous transporte dès les premières secondes au Pays du Soleil Levant. Murs rouges immaculés, lumières tamisées, estampes espacées les unes des autres : le cliché d’une certaine sérénité à la japonaise, en somme. Mais outre ce stéréotype hasardeux, Fuji, pays de neige nous plonge dans un univers aussi raffiné que méticuleux, aussi vraisemblable que fantasmagorique. Tour à tour est donné à voir aux visiteurs toute la douceur de scènes du quotidien comme toute la grandeur d’un paysage montagnard. De délicates oeuvres où la figure de la montagne trône non pas en maîtresse mais en gardienne. Au fil des estampes, le mont Fuji est tantôt propice à la représentation de la ruralité japonaise d’antan, tantôt le lieu de tous les fantasmes, de toutes les rêveries. Une figure double qui nous propose aussi bien une vision historique de cette région du Japon que philosophique et spirituelle. Fuji, pays de neige mais aussi pays du rêve.
Plus qu’une exposition onirique, Fuji, pays de neige nous plonge dans les coulisses de l’estampe japonaise, de son incroyable confection. L’estampe ou ukiyo-e signifie en japonais “image d’un monde flottant” ou “image d’un monde éphémère”, ce qui met par ailleurs en valeur l’idée sous-jacente de l’exposition : l’onirisme du mont Fuji. Quoi de mieux que l’estampe, donc, pour traiter le lieu de toutes les chimères ?
Mais plus qu’une interprétation, c’est une technique que nous permet de découvrir l’exposition Fuji. Naïvement, je reconnais avoir longtemps cru (jusqu’à dimanche dernier, du coup) que l’estampe était entièrement réalisée du bout d’un pinceau extrêmement fin. En réalité, l’estampe est produite à la chaîne à l’aide de sorte de plaques de bois gravées et recouvertes de peintures. Une superposition de couleurs, appliquées les unes après les autres. Ce n’est donc pas un travail de petite main au sens propre du terme, mais bel et bien d’orfèvre apposant avec une précision déroutante les blocs de bois exactement sur les contours des dessins.
A la prochaine soirée raclette, je mise assez gros sur ma toute fraîche culture de l’estampe pour faire sensation. Je vous en dirai des nouvelles.
Si l’exposition Fuji se traverse assez rapidement (une heure grand maximum), le musée nationale d’arts asiatiques Guimet est quant à lui un vrai dédale. Aussitôt entré dans ledit musée, tous les regards sont happés par les gargantuesques statues du hall principal. Bouddhas géants et autres divinités asiatiques (ici principalement khmers) qui, par leur grandeur, nous donnent presque le vertige.
Les collections permanentes du musée nationale d’arts asiatique Guimet ratissent les plus anciennes civilisations du continent, ce de l’Afghanistan au fin fond des Philippines. Une “splendide collection coloniale” m’a-t-on ironiquement fait remarquer… et soit, ces bijoux n’ont probablement pas leur place ici. Mais tant qu’ils y sont, je ne saurais que trop vous inciter à (re)découvrir ces sculptures, scépultures, objets du quotidiens, vases, fresques et autres moulages partiels de temples millénaires (ici des reproductions, donc) ! Déjà, parce que ça change de la Joconde; ensuite, car il se pourrait que vous trouviez au détour de l’imposante maquette d’Angkor ou d’une Shiva de trois mètres de haut et aux cinquante bras de bronze le brin de magie nécessaire à l’arrivée de l’automne.
Exposition Fuji, pays de neige,
Jusqu’au 12 octobre 2020
Musée national des arts asiatiques Guimet
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